Archives Janvier-février 2012


Hautes Roches, cuisine et vins à quatre mains

Vouvray a décroché son AOC viticole en 1936Montlouis lui a emboîté le pas seulement deux ans plus tard. Pourtant, Vouvray est longtemps restée une des AOC phare de la Touraine, éclipsant quelque son peu son homologue de la rive gauche. Sur le papier, leur palette est étrangement similaire. Elles proposent toutes les deux des vins natures allant du sec au liquoreux en passant par les demi-secs et les moelleux, sans oublier les bulles, déclinées en Méthode traditionnelle et Pétillant, ainsi que les toutes dernières Méthode ancestrale et Pétillant naturel. Si le Chenin, introduit en Touraine en 1490 par Thomas Gohier, seigneur de Chenonceaux, et son beau-frère Denis Brinçonnet, abbé de Cormery, est le cépage principal de ces 2 productions, par contre le Vouvray peut être obtenu avec un assemblage d'Orbois et de Chenin, dans la proportion maximale pour le premier cité de 5 % de cet encépagement original. Toutefois, je ne connais pas de vignerons qui utilisent ce cépage particulièrement résistant à la pourriture grise et prédisposé à concentrer les sucres. Alors, si l'un d'entre eux lit ces quelques lignes, qu'il me contacte. Je suis partant pour la découverte !

Le fait que la nationale N 152 (transformée depuis en départementale) passait sur la rive droite à proximité de ce vignoble et que les seuls points de traversée de la Loire se situaient, soit à Amboise, soit à Tours, n'ont certainement pas été étrangers à la prédominance de l'AOC Vouvray sur celle de Montlouis.

Mais heureusement pour la concurrence et la saine émulation, un pont a changé la donne entre les villes de Montlouis-sur-Loire et de Vouvray dans le milieu des années 90, en offrant aux œnophiles de tout poil, la possibilité de comparer les productions de ces 2 vignobles.

Depuis cette ouverture providentielle pour l'AOC Montlouis-sur-Loire (nouvelle appellation depuis novembre 2002 qui a succédé à celle de Montlouis), celle-ci a désormais le vent en poupe et le dynamisme de ses jeunes vignerons, à l'instar d'un Damien Delécheneau, l'a hissé petit à petit à la hauteur de sa prestigieuse rivale.

 

Alors, quand j'ai appris qu'une amicale joute culinaire était prévue aux Hautes Roches le 19 janvier 2012 avec un dîner dégustation concocté par Didier Édon & Didier Frébout, épaulé par les nectars de Damien Delécheneau et Vincent Carême, j'ai relégué mon régime "objectif perte de poids", pourtant bien parti, au second plan. Et c'est ainsi que ce jeudi soir 19 janvier, je me suis retrouvé invité avec Pascale mon épouse, au milieu d'une soixantaine de fines gueules, à explorer les accords mets/vins conçus par deux vignerons, et non par des sommeliers. Et ce choix a réservé quelques surprises.

Pour mettre les papilles en éveil, rien de tel que des bulles. Côté Damien, un Montlouis-sur-Loire "La Bulle" 2010, une méthode traditionnelle vive et fraîche. Côté Vincent, un magnum de Vouvray "Cuvée ancestrale" 2006, puissant, bien vineux et dont les bulles sont discrètes. A notre table, partagée avec deux responsables de Métro Tours, nos avis divergent. Pour ma part, après avoir flashé sur le Vouvray, je reviens vers le Montlouis-sur-Loire dont le côté incisif me semble plus approprié pour l'apéritif, à l'instar d'un Champagne Chardonnay.

Pour les amuse-bouche, Didier Edon, en bon breton, s'est exercé dans l'association terre & mer. Trois huîtres (Normandie, Marennes-Oléron et Belon), Cromesquis de tête de veau, Samoussa de ris de veau, Croûton à l'ail noir, Quasi de langue de veau, Mini fleur de courgette & Martensia maritima (appelée aussi mertensie maritime, pulmonaire de Virginie, sanguine de mer, huître végétale ou en anglais oysterleaf, sea lungwort), offrent un panel gustatif très large pour lequel les 2 vins précédents ont été maintenus. Compte tenu notamment du côté "terre" de 4 préparations, le Vouvray s'impose par sa vinosité qui lui permet notamment de les dominer sans toutefois les écraser.

Pour l'Étuvée de Saint-Jacques au jus de pomme émulsionné au beurre salé, pois gourmands et tagliatelles de céleri, Vincent avait misé sur un Vouvray sec 2009 et Damien sur un Montlouis-sur-Loire demi-sec "Les Grenouillères" 2010. Je dois avouer qu'en cours de repas, je ne suis pas un farouche partisan des vins demi-secs dont le potentiel "sucré oscille entre 8 et 35 g. Quand celui présenté en dispose de 28 g/l destiné à des Saint-Jacques qui sont par nature moelleuses et légèrement douceâtres, même ragaillardies par un jus de pomme, l'accord favorise le Vouvray qui met à profit sa structure minérale sur ce plat dont les composantes se sont révélées harmonieuses et fort bien maîtrisé par Didier Frébout.

Deuxième plat de cette soirée, l'Aiguillette de Saint-Pierre "dans le cœur", béarnaise "retour des Indes dressée par Didier Edon. Le poisson est d'une excellente qualité, habilement rehaussée par cette béarnaise aux épices douces à se lécher les pattes arrières. Damien a opté pour un Montlouis-sur-Loire pétillant naturel "Nouveau-Nez" 2010 quand Vincent s'est orienté vers un Vouvray demi-sec "Le Peu Morier" 2008. Dérangé au départ par les bulles du pétillant naturel de Damien, au final ce vin me conviendra mieux pour contrebalancer les aromates de la sauce béarnaise "orientalisée".

Après les produits de la mer, passage à ceux de la terre. Là, c'est Didier Frébout qui s'est attelé à accommoder un Quasi de veau rôti, jus crémeux aux cèpes, carottes fondantes au persil plat. Ce sera pour moi le plat phare de cette réjouissance gourmande. Sobre dans sa présentation, la viande est tendre et moelleuse, le jus crémeux aux cèpes parfait et les carottes (de sable ?) sont à "fondre" de plaisir. Les 2 vignerons, qui je le précise, n'avaient pas goûté les différents plats avant de proposer leurs vins (ce qui rendait  leur exercice d'autant plus périlleux et risqué), se sont retrouvés sur le choix d'un vin sec de leur production. Vouvray "Le Clos" 2007, un "sec tendre", et Montlouis-sur-Loire sec "Clef de Sol" 2010 s'affrontent donc amicalement. Le premier flacon, ample, riche et harmonieux, se révèle en phase avec le plat, supportant bien la crème de cèpes; le second, très minéral, légèrement oxydé par une fermentation alcoolique en barrique, est un peu trop sec pour s'enlacer totalement avec la sauce d'accompagnement et les carottes fondantes. A la réflexion, j'aurais bien vue la douce musicalité de cette Clef de Sol 2010 sur le Saint-Pierre.

Les fromages constituent  toujours un moment gustatif particulièrement intéressant d'un repas, tant à partir de 3 types de laits (chèvre, brebis et vache; 4 si on ajoute le lait de bufflonne), la diversité offerte est immense, engendrant des vins d'accompagnement très différents. Le choix opéré pour ce dîner s'est appuyé sur trois fromages de la boutique tourangelle de Pascal Beillevaire (qui dispose depuis 2008 d'un point de vente dans les fameuses Halles de Tours du centre ville). Ce sera un Pouligny-Saint-Pierre (Chèvre), une Fourme d'Ambert fermière (vache à pâte persillée) et un Affidélice® * (vache à croûte lavée baptisé par le serveur, Chablis). L'option retenue de servir des vins moelleux (Vouvray 2008 et Montlouis-sur-Loire Clef de Sol 2010) ne m'est apparue comme la plus judicieuse mais elle a eu le mérite de nous fournir un long sujet d'expression orale. En effet, le chèvre et la pâte à croûte lavée ne sont pas dévoilés au mieux de leur forme avec cette escorte vineuse; par contre, la Fourme d'Ambert s'est beaucoup mieux arrangée de leurs sucres résiduels respectifs (107g/l de sucre résiduel pour le vin de Damien), à l'instar d'un Cérons ou d'un VDN. Bref, peut-être aurait-t-il été préférable de proposer un vin sec, légèrement "gras". Et chez Damien un vin s'imposait pour cette soirée, en parfaite osmose avec l'intitulé de ce dîner, le Touraine "Quatre mains".

 

* Affidélice® : fromage "marketing" de la maison Berthaut. Cette famille, sous la houlette de Simone et Robert Berthaut a relancé en 1956 la fabrication de l’Époisses fermier au lait cru. Hélas, cette excellente fromagerie s'est orientée depuis vers une production standardisée avec l'utilisation d'un lait pasteurisé. Cette démarche est indigne d'une véritable production fromagère qui se veut traditionnelle quand elle met en avant sa production faite notamment avec des laits de premières mises à l’herbe des vaches laitières, ou encore ceux de l’entrée de l’hiver, qui est un lait riche et aromatique, produit par les vaches pâturant les regains d’automne. Il y a là quelque chose qui m'échappe, qui m'étonne, qui m'interroge, d'autant plus quand Pascal Beillevaire sélectionne cette maison alors que Gaugry et le GAEC des Marronniers produisent tous deux un Époisses au lait cru, le second étant de surcroît fermier.

Si je ne conçois pas un repas sans fromages, je ne l'entends pas non plus sans dessert. Cette conclusion de ce dîner, heureuse et nécessaire pour tout bec sucré, était l'œuvre de Didier Frébout. Elle se présentait sous la forme d'une Poire rôtie au miel épicé, glace au lait d'amandes. Je passerais sur la glace au lait d'amandes dont j'ai pu m'entretenir avec son compositeur, pour revenir sur la Poire rôtie, parfaitement cuite, bien soutenue par un miel épicé subtilement dosé et surmontée d'une originale couronne en pâte à choux, moelleuse et craquante à souhait. Encore une jolie exécution de ce chef installé dans son Épicurien à Monnaie, passé notamment chez Jean Bardet, un chef à qui je ne manquerais de rendre une visite d'ici la fin mars 2012, ne serait-ce que pour goûter sa "Beuchelle à la Tourangelle dans une croustillante corne d'abondance" ou son "Oeuf cassé sur une salade de chou-fleur et châtaignes aux tronçons d'anguille fumée, crème de pissenlit".

Pour ce dessert, Vincent nous a sorti un inattendu Vouvray pétillant demi-sec "Cuvée Ancestrale" 2008 et Damien, un superbe Montlouis-sur-Loire "L’Équilibriste" 2009. J'ai été désarçonné par l'harmonie qui s'est manifestée entre ce dessert et les 2 vins présentés, laissant mes faveurs osciller tantôt vers l'un, tantôt vers l'autre, sans que je puisse manifesté une préférence. Et à force d'osciller, en plus des breuvages dégustés auparavant, le cadran de mon alcotest "Dragër" a fini par afficher un fatidique 0,73 g/l, me signifiant qu'il était donc préférable d'accepter la généreuse proposition de Dider Edon de passer la nuit aux Hautes Roches, prudence et raison obligent. Mes deux compagnons de table, que je remercie d'ailleurs pour nous avoir supporté et écouté durant tout ce dîner, afficheront des résultats à faire pâlir la Prévention routière, puisqu'ils seront en dessous des fatidiques 0,50g/l. Comme quoi le fameux slogan "Un verre ça va, trois bonjour les dégâts" est complètement inapproprié. Rien ne vaut en effet faire confiance aux résultats d'un alcootest homologué pour prendre la route, ou non, en toute sécurité et sérénité.

En résumé, nous avons passé une soirée inoubliable d'où il ressort que l'art de l'assemblage des vins par un vigneron diffère totalement de celui du mariage de sa production avec celle des nourritures terrestres et qu'il est plus facile de critiquer des accords vineux que de les concevoir. Je partais avec un à priori défavorable sur les vins de Vincent Carême goûtés (ou plutôt mal goûtés) au salon du Petit-Pressigny du 6 juillet 2008. Ce dîner, outre son excellente qualité d'ensemble, fruit de l'œuvre commune de Didier Edon, de Didier Frébout et de leurs brigades, sans oublier l'ensorcelante Barbara, a eu également le mérite de me faire revenir sur mon avis porté à la hâte à propos du travail respectable d'un vigneron, Vincent Carême, chez qui je me suis promis de faire escale prochainement ... en plus de celle prévue chez Coralie & Damien. Merci encore à Didier Edon pour cette généreuse invitation à cette soirée !

Les Hautes-Roches

Responsable et chef : Didier EDON

86 quai de la Loire

37210 ROCHECORBON

Tél. : 02 47 52 88 88

Télécopie : 02 47 52 81 30

Email : hautesroches@relaischateaux.com

Site web : www.leshautesroches.com

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Menu de la Saint-Valentin du 14 février 2012
Un menu à 5 plats pour 85 €, boissons en sus
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Hautes Roches, le premier hôtel de luxe troglodyte de l'hexagone

Les Hautes Roches, ce sont aussi 14 chambres classées 4 étoiles dont 12 ont la double particularité d'être troglodytes et orientées plein sud. Ce complexe hôtelier a vu le jour grâce à la volonté et à la ténacité d'un homme, Philippe Mollard. Ce fils de "bistrotier" du 115 de la rue Saint-Lazare, propriétaire des châteaux de Marçay et Noizay, a fait l'acquisition en 1987 de ce qui était devenu entre 1855 et 1975 un domaine viticole réputé, le Domaine des Pentes. Après 18 mois de travaux pharaoniques, il a transformé et réhabilité des anciens dortoirs creusés dans le tuffeau et réservés aux moines de l'abbaye de Marmoutier pour les transformer en chambres d'hôtel. Meublées avec goût, spacieuses (70 m2 en moyenne), elles possèdent tout le confort moderne qu'on attend d'un établissement affilié à la prestigieuse chaîne des Relais & Châteaux. Certains s'étonneront peut-être de ne pas y trouver la climatisation, mais avec 25 mètres de protection calcaire au-dessus de votre tête, la température naturelle permet, même en cas de fortes chaleurs, de ne pas dépasser les 24/25°. Les salles de bains ne sont pas en reste et offrent à leurs hôtes le maximum de confort. Et, petit détail qui pour moi a son importance, les sèche-cheveux viennent de Velecta-Paramout, le top du top de cet accessoire capillaire.

Pour notre première nuit dans une chambre troglodyte, nous avons bénéficié de la chambre N° 8. On y  accède par un superbe escalier en pierre. Au petit matin, nous avons découvert et apprécié la vue magnifique sur le seul fleuve sauvage d'Europe, la majestueuse Loire.
Le petit-déjeuner propose pain au chocolat et croissant croustillants, brioche moelleuse, petit pain bien cuit, jus d'orange maison, confitures R & C, yaourt onctueux et sans acidité, verre de fruits frais savoureux et beurre Charente-Poitou AOC en papillote, de quoi débuter parfaitement  la journée. Si toutefois, vous trouviez ces offrandes trop frugales, le malicieux serveur vous proposera du jambon, des œufs ....

Et encore merci mille fois à Didier Edon pour ce magnifique et somptueux cadeau. 

Les Hautes-Roches

Responsable : Didier EDON

86 quai de la Loire

37210 ROCHECORBON

Tél. : 02 47 52 88 88

Télécopie : 02 47 52 81 30

Email : hautesroches@relaischateaux.com

Site web : www.leshautesroches.com


Nicolas Multon remporte le "Trophée 'Chef & designer' dessert à l'assiette"

Ancien responsable des desserts de l'Amphitryon à Lorient (2 étoiles Michelin et 5 toques Gault & Millau), le chef-pâtissier Nicolas Multon préside depuis janvier 2009 aux destinées de ceux de l'Arnsbourg, le 3 étoiles de Jean-Georges Klein installé à Baerenthal.

Dimanche 5 février 2012, dans le Hall 7 du Palexpo de Genève, huit équipes composée chacune de 3 professionnels s'affrontaient. Celle de Nicolas Multon, associé à Vincent Minery, designer, et à Julian Tournier, commis, a survolé les débats. Après 4 heures d'épreuve, elle est arrivée première distançant la deuxième de vingt points. Son score, 148 sur les 150 possibles !

Cette manifestation pâtissière était co-présidée par Philippe Rigollot (MOF Pâtisserie 2007 et Champion du Monde de Pâtisserie 2005), c'est tout dire.

Rappelons que ce jeune chef du "sucré" avait remporté en 2007 la 2ème édition française du concours "Dessert of the Year" avec un Millefeuille aux senteurs de sarrasin, marmelade de mûres et pétales de rose cristallisées, glace aux éclats de dragées.


Sylvain Guillemot, la seule "crème" présente dans sa cuisine, c'est lui !

C’est du marché de Lalbenque (un marché "paysan" à ne manquer sous aucun prétexte quand on passe dans le sud Lotois) que proviennent les truffes mélanosporum (un décret paru récemment va rendre obligatoire au 1er juillet 2012 l'indication de cette précision latine) avec lesquelles Sylvain Guillemot alimentent son superbe menu à 135 € 00 consacré au "Diamant noir de la cuisine".

Ce 10 février 2012, pour permettre aux gourmands de passage d’en humer l’entêtant parfum, Marie-Pierre leur présentait un réceptacle en contenant quelques spécimens. Après une coupe de Champagne "Jacques Picard", associant harmonieusement Chardonnay, Pinot noir et Pinot meunier, pour aiguiser nos papilles, nous avons ouvert les hostilités avec 3 excellentes patiences : Craquant de betterave jaune & haddock - Sucette de courge & persil (Sublime) - Feuilleté de sarrasin et mousse de lait ribot.

Notre déjeuner a été une suite de plats reflétant toute une palette de subtilité et de richesse d'accords produits/truffes concoctés par Sylvain & son équipe.

Tout d'abord, une excellente Crème d’œufs à la truffe où le produit de la poule fixe et restitue idéalement le parfum de la truffe. Pour l'accompagner, Isabelle Jumel, la sommelière, nous sert un Chardonnay VDP d'Oc du domaine de Mairan. Premier plantage de ma dégustation à l'aveugle, et ce ne sera pas le dernier !

Ensuite, une Tarte de navets, espuma de poireaux à la truffe. C'est une superbe réussite, avec des navets cuits à la perfection qui se marient admirablement avec le champignon. Le poireau complète l'union. Vin d'escorte, un Anjou sec AOC 2009 du Château de Fesles, cépage Chenin. Moi qui avait comme seul souvenir de ce domaine un Bonnezeaux 1947 clôturant une dégustation du 16 avril 1985 orchestrée M. Boivin, je reste ébahi par la fraîcheur aromatique de cette production pourtant basique.

On passe au 3ème service avec un Oursin en surprise à la truffe. Ce plat m'a déstabilisé, tant sa dégustation s'est opérée dans une lutte d'influence entre l'iode et la truffe dont aucune n'a réussi à surpasser l'autre. Mais l'expérience était intéressante et instructive. Isabelle, les yeux pétillants de malice, nous verse un Jasnières AOC 2005 de Christine de Mianville. L'accord est une nouvelle fois parfait, avec un chenin suffisamment puissant pour résister à l'iode et à la truffe.

Suivent des Ravioles d'oignons & bouillon de truffes, craquant de foie gras. Ce plat magnifie et remet en selle la truffe, bien présente, bien soutenue et ainsi bien mise en valeur. L'accord vineux nous fait explorer un vin de chez nous (que je ne reconnais pas !), un vin méconnu basé sur le cépage Romorantin, un Cour-Cheverny AOC 2007 de Philippe Tessier. Ce cépage donne souvent des vins durs dans leur prime jeunesse qui ne demandent qu'à s'assouplir pour développer tout leur potentiel. L'année 2007 figurant dans les millésimes particulièrement réussi, celui-ci épaule au mieux l'association complexe de ce plat.

Petite pause "cuisine" histoire d'aller voir Sylvain à son piano et surtout de le féliciter pour ce que je viens de déguster. Avec les 2 plats qui suivront, c'est assurément le meilleur "Menu Truffe" qu'il nous ait servi depuis février 2007 que nous faisons notre pèlerinage annuel à Noyal.

Retour à table pour le plat principal et ses deux choix possibles. J'ai opté pour des Saint-Jacques à la truffe. Les noix sont charnues, truffées "demi-deuil", accompagnées d'une friture de panais et d'un jus de déglaçage à la truffe. On goûte, on lève les yeux au ciel, bref on déguste et on succule en silence... en attendant la suite. Mon épouse a préféré prendre la Poularde cuite au Vin Jaune à la truffe. Quand elle provient de Paul Renault (la poularde bien sûr !), qu'elle est cuite longuement à basse température, soit 3 heures à 80/85 °, quand elle est merveilleusement soulignée par une sauce au Vin Jaune et quand elle est servie avec générosité, on peut avoir des regrets de ne pas avoir suivi les conseils avisés de Marie-Pierre. Mais on goûte quand même et on applaudit des deux mains à cette petite merveille. Isabelle descendra à nouveau dans le sud pour trouver ses accords vineux avec pour mes Saint-Jacques un Châteauneuf du Pape AOC blanc 2004 du Château de la Gardine (30% Grenache blanc, 40% Roussane, 10% Bourboulenc et 20% Clairette) et pour la Poularde, un Côtes du Rhône AOC 2007 Château des Tours 100 % grenache (vin d'Emmanuel Raynaud, également propriétaire du mythique Château Rayas). Je ne vous étonnerais pas si je vous glisse dans l'oreille que la concordance était encore au rendez-vous.

Passons au  dernier volet de ce déjeuner avec un Croustillant pain grillé à la truffe, une dénomination qui ne reflète pas la réalité de cette remarquable préparation (je l'aurais plutôt intitulé : "Soufflé topinambour et truffe, craquant de pain brûlé et glace à la truffe en millefeuille"). Pour ce dessert,  Sylvain a subtilement joué sur les différentes structures, associant avec maestria, le moelleux (le soufflé), le craquant (les fines feuilles de pain brûlé) et le croquant (la glace légèrement dure). Depuis une expérience pas très concluante chez Alex Pélissou en février 2000, j'étais sceptique quand à la valorisation de la truffe au travers d'une présentation glacée, surtout quand celle-ci est un sorbet. Comme pour l'entrée de ce menu, la présence d’œuf dans une glace a certainement permis de fixer le parfum de la truffe.  Et je ne serais pas étonné que Sylvain ait en plus enfermé ses œufs dans une boîte contenant son or noir. La dégustation de cette glace restera dans mes souvenirs, et dans mes papilles, car plus d'une demi-heure après, malgré un café, j'avais toujours en bouche le goût de la truffe.

Sur ce plat, Isabelle a certainement réussi le plus beau coup de bluff de sa sélection en me servant un assemblage de Riesling et de Pinot gris 2007 de Marc Kreydenweiss. D'une part, j'étais à cent lieux de penser qu'en Alsace, mis à part l'Edelzwicker, on pouvait associer des cépages nobles, d'autre part, je n'étais pas un fan des vins de Marc Kreydenweiss. Mais c'est vrai qu'à ma décharge je les avais testés il y a bien longtemps (1987 à Vinexpo) et ceux-ci jouaient alors beaucoup trop dans la cour des sucres résiduels trop présents. Là, rien de tout cela. L'assemblage est harmonieux, suffisamment puissant pour faire accord avec la truffe (le Riesling ne doit pas y être étranger) et comme le vin est bien sec, il contrebalance parfaitement la touche doucereuse de la glace.

Compte tenu du haut niveau de la prestation de Sylvain ... et d'Isabelle, il convenait de terminer en beauté ce déjeuner. Comme j'avais dans ma glacière un Champagne Moutard 2005 en mono cépage Arbanne, nous avons pu fêter dignement l'évènement, avec même la grande joie de voir Camille, la fille de Marie-Pierre & Sylvain, s'installer aux fourneaux pour nous cuisiner puis nous servir un excellent Moelleux au chocolat et sa glace vanille. Sylvain, je crois que tu peux dormir tranquille, ta relève est assurée ...

Auberge du Pont d'Acigné

Marie-Pierre & Sylvain GUILLEMOT

Le Pont d'Acigné

35530 NOYAL-SUR-VILAINE

Tél. : 02 99 62 52 55

Email : pont.dacigne@wanadoo.fr

Site web : www.auberge-du-pont-dacigne.com

Fermé : lundi, mardi et dimanche soir


Les chambres d'hôtes de Marie-Annick

Bien située dans la périphérie ouest de Rennes, l'accueillante maison de Marie-Annick Louapre propose 5 chambres d'hôtes, spacieuses et bien entretenues. Toutes sont classées 3 épis et disposent d'une petite kitchenette avec un réfrigérateur. Si en semaine leur disponibilité est des plus aléatoire, le week-end offre plus de possibilités aux estivants en mal d'escale dans la capitale bretonne. Les petits déjeuners sont servis dans un vaste salon. Ils sont copieux, avec notamment pain frais, croissant, chausson aux pommes ou autres viennoiseries. On peut les agrémenter d'excellentes confitures maisons aux compositions originales comme celle au "Rhum arrangé". Dernier argument, et il est de poids, le prix de la nuitée pour 2 personnes se monte à 44 € 00. A ce tarif, s'ajoute la fameuse taxe de séjour qui fleurit dorénavant un peu partout, un impôt créé pour remercier les vacanciers de choisir la ville ou le village de villégiature qui les accueille, une démarche très sympa, non, des équipes municipales ? Ma seule observation sera pour certains matelas dont on perçoit parfois quelques ressorts, les Gîtes de France locaux n'ayant pas eu le courage d'imposer les matelas en latex ou en rembourrage similaire.

Et comme vous êtes ici dans le véritable esprit "Gîtes de France", c'est à dire dans le monde paysan, la famille Louapre vous propose de la viande de bœuf et de porc en caissettes. Se renseigner pour les conditions et les tarifs.

Chambres d'hôtes & gîtes

Marie-Annick LOUAPRE

La Touche Thébault

35132 VÉZIN-LE-COQUET

Tél./Fax : 02 99  60 19 74

Email : mannicklouapre@gmail.com

Site web : www.gite-bretagne-latouche-thebault.fr


Rennes et son marché "délices"

En ce samedi matin 11 février 2012, il ne faisait pas bon traîner sur le marché des Lices où la température glaciale, renforcée par une petite bise, avait fait descendre le tuyau du thermomètre aux alentours de - 8°. A l'extérieur, que ce soit sur le carré des poissonniers ou le long des halles couvertes, beaucoup de professionnels avaient préféré ne pas dresser leur bancs et éventaires. Malgré tout, les lieux étaient toujours aussi vivants, chaleureux et animés. Idem à l'intérieur des deux halles, que ce soit celle des producteurs ou celle des bouchers.

Premier arrêt chez les Névot, histoire de faire le plein de viandes de bœuf et de porc. Malgré le froid, on fait la queue tranquillement en attendant son tour. On discute, on échange, on communique et au détour d'une petite question je suis content d'apprendre que Pierre, le fils de Marie-Christine et Jean-Paul, a repris l'affaire avec un associé. La tradition bouchère commencée en 1920 à Montauban-de-Bretagne, va donc perdurer dans la famille Névot, pour le plus grand bonheur de leur clientèle qui fréquente ses différents points de vente. Côtes de bœuf, rôtis dans le rumsteck et le tende de tranche, joues de porc, gîte à la noix, plat de côtes et paleron pour pot au feu  vont ainsi s'accumuler dans notre charrette. Côté dépense, le rapport qualité/prix est des plus avantageux comme en témoigne notre ticket de caisse.

Le second et dernier arrêt sera réservé à Paul Renault (Cf. la rubrique "Portraits d'artisans"), la figure emblématique de ces halles des Lices, l'homme qui a lutté et s'est battu pour qu'elles ne soient pas démolies à la fin des années 70. Je lui avais commandé 4 poulardes de lait, des volailles à la chair fondante que la plupart des bons cuisiniers s'arrachent. Elles étaient bien sûr abattues, plumées et vidées, et n'étaient donc pas vivantes comme le jour où ce facétieux personnage avait voulu me le faire croire ... et j'avais marché, couru même !

Ets NEVOT SARL

Marché des Lices de Rennes (uniquement le samedi matin)

Etals 19 & 20 (sous la halle des bouchers)

35000 RENNES

Tél./Fax : 02 99 06 60 94

 

Autres points de vente :

- la maison mère à La Hucherais

35360 MAUTAUBAN-DE-BRETAGNE

 

- les marchés de la région (Cf. la Carte de visite ci-dessus)

Paul RENAULT

Marché des Lices de Rennes (uniquement le samedi matin), sous le pavillon Martenot où se côtoient volailles, produits laitiers, miels, pains d'épices, etc. …

35000 RENNES

 

Egalement :

 - aux Halles Centrales de RENNES, boulevard de la Liberté.

Tél. : 02 99 79 19 76 (du mardi au samedi, sauf le jeudi)

- à L'Entillère

35680 LOUVIGNÉ-DE-BAIS

Tél./Fax. : 02 99 00 05 90 ou le 02 99 49 11 09 après 20 heures


Les Lices et ses coulisses
Les Lices et ses coulisses

Les amoureux de ce marché seront ravis d'apprendre que fin 2009, Evelyne COHEN MAUREL et Xavier HINNEKINT lui ont consacré un merveilleux livre intitulé "Les Lices et ses coulisses", un ouvrage paru chez "Les éditions des Lices", un livre à se procurer dans toutes les bonnes librairies et par l'intermédiaire de son éditeur.

 

 

 

 

Les Editions des Lices

10 rue de Robien

35000 RENNES

Tél. : 02 99 38 28 10

Email : editionsdeslices@gmail.com

Site web : www.editionsdeslices.com


Philippe Bouvier, le chocolatier discret de Rennes

Après un apprentissage chez Anquetil à Rennes au début des années 70, Philippe Bouvier a perfectionné sa maîtrise du cacao auprès des plus grands. Dalloyau, Lenôtre et surtout Hans Stucki, le célèbre cuisinier de Bâle, 2 étoiles au Michelin, chez qui il occupera les fonctions de chef pâtissier durant 10 ans. Mais ses racines bretonnes le rattrapent et l'appellent. Il reviendra donc sur ses terres, précisément à Rennes, où il régale depuis plus de 20 ans une clientèle gourmande exigeante.

Depuis le 1er janvier 2011, Philippe Bouvier a une nouvelle fois changé d'adresse, mais là, il semble que ce soit définitif. Après les boutiques de la rue de la Parcheminerie et de la rue de Nemours, près des Halles Centrales, celle de la rue de la Monnaie, derrière la place des Lices, place désormais à la boutique du 3 rue Toullier où il a posé ses tablettes, de chocolat bien sûr. Cette nouvelle boutique, proche de l'étrange église Toussaints, n'est pas très visible, cachant ses vitrines sous des arcades piétonnières. Les chocolats sont élaborés depuis 2008 dans un laboratoire-boutique sis 1 rue de la Tremblaie. Certes cet atelier est implanté dans une zone industrielle pas très accueillante mais intelligemment complété par une boutique de vente, il permet de faire ses emplettes cacaoyère sans être confronté au délicat problème du stationnement en centre ville.

Nous avons choisi de nous composer un assortiment de 24 chocolats. Ils ont été logés dans un fort joli coffret blanc, une couleur idéale pour mettre en avant les qualités visuelles de l'enrobage noir. Petits, ils pèsent environ 6/7 g et bénéficient d'une très belle finition. Leur couverture noire est fine, longue en bouche et les fourrages de ganaches parfumées, aux fruits, aux épices, aux fleurs, aux infusions ou bien nature, sont admirables d'équilibre. Les pralinés sont soyeux, évitant le côté écœurant des chocolats bas de gamme des industriels qui les dévalorisent. Ceux aux pâtes d'amandes sont de la même veine.

Bien sûr, si les chocolats de Philippe Bouvier sont divins, il ne faut pas pour autant négliger ses préparations pâtissières qui m'ont semblé des plus appétissantes.

J'ai repéré le Macumba (Crémeux Mangue & passion, mousse chocolat blanc et biscuit amande & coco) et le Tentation (Sablé breton, cœur de litchi, mousse chocolat blanc & coulis de groseille) ... pour une autre venue à Rennes.

La maison expédie ses chocolats mais pas ses macarons. A ce sujet Philippe Bouvier avance un argument imparable : "Si j'expédie mes macarons, ils ne pourront pas rester moelleux !"

Philippe BOUVIER

3 rue Toullier

35000 RENNES

Tél. : 02 99 78 14 08

Site web : www.chocolats-bouvier.fr

Horaires d'ouverture :

Lundi 14 h 30 - 19 h 00

Mardi au vendredi 9 h 00 - 19 h 00

Samedi 8 h 30 - 19 h 00

Dimanche: 8 h 30 - 12 h 30

Philippe BOUVIER

Laboratoire et boutique

3 rue de la Tremblaie (En zone industrielle)

35000 RENNES

Tél. : 09 66 98 44 90

Site web : www.chocolats-bouvier.fr

Horaires d'ouverture :

Lundi : 10 h 00 - 17 h 00

Mardi au vendredi : 10 h 00 - 18 h 00



Domaine de Rochevilaine, un écrin niché sur l'océan ... ou presque

Comment peut-on résister à la situation idyllique de ce complexe hôtelier ? Tout ici est conçu pour le bien-être de ses hôtes et invite au repos et à la béatitude. Que ce soit les chambres avec vue sur mer, la piscine, le hammam, le sauna et bien sûr le restaurant.

L'accueil à l'hôtel est courtois et chaleureux. Seul petit regret que pourrait formuler une clientèle exigeante et habituée des 4 étoiles (ce qui n'est pas notre cas), il n'y a pas de bagagiste présent en permanence. On se débrouille donc pour porter ses valises, leur faire franchir les lourdes portes d'entrée en verre et les acheminer en chambre, la 85.

Côté restaurant, dont l'entrée se situe à un peu plus de 50 mètres de celle de l'hôtel, l'accueil est également stylé et souriant, prouvant, s'il en était besoin, que nous sommes bien dans un "Relais & Châteaux".

Grégory, le maître d'hôtel du restaurant, après nous avoir fort courtoisement accueillis, nous a remis la carte de l'établissement et son livre de cave. Si notre choix était déjà fait, celui du "Menu Confiance", cela m'a toutefois permis de parcourir les ressources des autres propositions. Pour les vins, nous avons plébiscité la formule d'accompagnement à 25 € par personne. Pour ce forfait vous bénéficiez de 7 vins au verre, d'eau minérale et d'un café, un tarif dont bien des professionnels feraient bien de s'inspirer, tant celui-ci est particulièrement attractif et financièrement intéressant, surtout quand on découvre au fil du repas l'extrême qualité des vins servis (Chante Coucou notamment).

Les hostilités ont débuté de la plus aimable façon grâce à des Saint-Jacques contisées à la truffe, déposées sur un délicieux velouté de navets aux truffes et rehaussées d'un subtil parmentier de cresson. Julie, la jeune fille assurant les fonctions de sommelière, nous a proposé sur cette entrée un Chablis 2008 de chez Moreau Naudet, sans aucune acidité, très floral. A propos de ce vin, à l'avenir je lui suggère modestement d'éviter de détailler avec minutie la composition du sous-sol du vignoble. Outre que ça fait étalage de 2 grammes de confiture sur une biscotte de 50 cm2, cela n'apporte pas grand chose à la dégustation. Sauf naturellement si le client s'y intéresse et le demande. Je pense que si Hervé Guinoiseau, le sommelier attitré de la maison, s'était occupé de notre table, il n'aurait pas agi de la même façon. Pour le deuxième plat, j'ai apprécié l'apparition toujours très agréable du service sous cloche, protégeant jusqu'à son ouverture une Barbue, risotto de potimarron et quintessence à la carotte, une présentation enjouée et guillerette très intéressante. L'accord vineux se fera sur un Limoux AOC de cépage chardonnay, au fruité élégant, riche mais sans lourdeur. Le troisième sera une ode au prince de l'océan, le homard.  Cuisiné en fricassée associé à une délicate mousseline de panais coraillée, c'est net, précis, bien marin. Cerise sur le gâteau, de superbes petites chips de corail, très iodées, viennent agrémenter ce plat ! 

Pour l'accompagner, un excellent Lirac blanc 2010, domaine Duseigneur.

La petite pause fraîcheur traditionnelle, qui n'entre pas dans mes habitudes culinaires, sera assurée par un Sorbet au Marc de Gewurztraminer parfumé, exhalant bien les caractéristiques de ce breuvage. 

Après ce petit intermède sucré dont on ne m'enlèvera pas de l'idée qu'il n'a rien de digestif, on repart sur une viande grâce à une Canette. Parfaitement cuite, elle est agrémentée d'une originale et suave mousseline de choux de Bruxelles. Le vin d'escorte sera la redécouverte du fabuleux Côtes du Marmandais d'Elian Da Ros (prononcé bien Elian, sans finale féminine, l'intéressé n'apprécie pas ... et me l'a fait savoir lors d'une dégustation en mai 2003). Dans ce millésime 2008, le Chante Coucou se montre fruité et bien épaulé, avec quelques notes épicées en phase avec la canette. Dans un menu dégustation, je crains toujours de voir apparaître un chariot de fromages, non pas que je n'apprécie pas les fruits du lait transformé, bien au contraire, mais cela confine souvent à rendre le déjeuner un peu lourd. Heureusement, alors que nous anticipions notre intérêt pour le vin blanc sur une telle présentation, la "sommelière" nous a rassurés en nous dévoilant l'arrivée d'une préparation fromagère, une Tome de Muzillac en croustillant de pain de seigle et confiture de griottes. J'ai beaucoup apprécié la légèreté de cette composition et surtout, pour l'épauler, l'étonnant VDP de Vendée 2006 issu de cépage Merlot, très "griottant" .

Le premier dessert se présentera sous la forme d'un Nougat glacé aux éclats de pistache, le second, d'une Ganache au chocolat, glace vanille et émulsion au café. Pour les vins, ce sera d'abord un Jurançon 2008 du Domaine de Souch produit par Yvonne Hegoburu. Sans être opulent comme la cuvée Marie Kattalin du même domaine, ce moelleux est agréable et digeste, fruit de l'équilibre entre petit et gros manseng. Sur le chocolat, je n'en espérais pas tant avec un VDN Maury. Celui qui nous sera servi en millésime 2010 provenait du Domaine "Les Terres de Fagayra" de Marjorie & Stéphane Gallet. Bien moelleux, suave, il était la parfaite expression, dans sa fougueuse jeunesse, de cette AOC pas assez connue pour remplacer le traditionnel Porto ...

Petit détail, mais d'importance, le pain servi au Domaine de Rochevilaine provient du boulanger de Muzillac. Cette sage décision n'est pas toujours hélas l'apanage de bon nombre de cuisiniers qui préfèrent passer beaucoup de temps à pétrir le leur avec au final une valeur gustative qui reflète rarement les louables efforts accomplis.

L'autre atout du Domaine de Rochevilaine, c'est naturellement son hôtel, un écrin pratiquement posé sur l'océan. Son site est un haut lieu de l'histoire bretonne et sera le témoin de la "Bataille des Cardinaux" où la France sera humiliée par les Anglais et laissera périr 6 500 personnes.

En 1952, un industriel s'entichera des lieux et en fera l'acquisition. Les travaux de restauration dureront 4 ans et transformeront des ruines en une agréable auberge dont le guide Michelin 1958 lui accordera ses faveurs. Viendront ensuite les aménagements de Jean-Pierre Liègeois, médecin qui fera renaître dans ces lieux l'esprit des thermes phéniciens.

25 ans plus tard, c'est au tour de Bertrand Jaquet de prendre possession du Domaine de Rochevilaine. Spa marin, adhésion à la chaîne hôtelière Relais & Châteaux, étoile au Michelin, l'établissement va acquérir au fil des années une solide réputation internationale.

Aujourd'hui l'hôtel héberge 38 chambres disséminées sous différentes formes d'habitats. Que ce soit celle du Manoir de la Mine d'Or sur la baie en closerie privée ou la suite Junior avec vue sue la côte et le phare, en passant par la Comptoir des Indes "sur les rochers" avec terrasse et les Duplex et Appartement terrasse mer, tout le monde peut trouver une chambre à son goût et suivant son budget, ou presque. Précisons que le Domaine concède en période creuse des formules de location à des tarifs particulièrement attractifs, comme celle d'ailleurs dont nous avons bénéficié, super cadeau de Noël de nos enfants.

Domaine de Rochevilaine

Propriétaire : Bertrand JACQUET - Chef : Patrice CAILLAULT

Pointe de Penn Lann

56190 BILLIERS

Tél. : 02 97 41 61 61

Fax : 02 97 41 44 85

Email : domaine@domainerochevilaine.com

Site web : www.domainerochevilaine.com


Crêperie Dan Ewen, quand on aime ... on y revient

Compte tenu de l'accueil et de la qualité des crêpes servies dans cet établissement vannetais, auquel il convient d'ajouter le fameux épisode de la "sacoche oubliée", nous nous étions promis de revenir ici, dès notre retour en pays breton. Malgré un déjeuner conséquent à Rochevilaine, la promesse a été honorée. 

Première surprise, Françoise Danet a cédé ... provisoirement, ses biligs à son compagnon, Didier Paulay. Qu'elle se rassure, la qualité des ses exécutions, qu'elles soient salées ou sucrées étaient remarquables. Je constate très vite que nous avons bien fait de réserver car la salle va se remplir, malgré le froid glacial qui règne en cette fin de WE sur la Bretagne, à la vitesse grand V.

 

Après une attente un peu longue, un jeune homme est venu s'enquérir de nos envies. Galette à l’œuf et Galette à l'andouille de Guémené pour commencer, Crêpe au sucre et Crêpe aux pommes rissolées et beurre salé pour conclure. Seul petit contre-temps, la rupture de stock de la Telenn Du à la pression, remplacée par la "Dragons", une bière ambrée, à la pression, fraîche et goûteuse, comme toutes les bières de chez Lancelot, bières qui je le précise, sont toutes issues de fermentation haute.

Dan Ewen est fière de citer dans sa carte le nom et l'origine de bon nombre de ses produits et des artisans de bouche qui lui fournissent, démarche que je salue. Ainsi le sarrasin vient de la Minoterie "Le Stunff" à Bubry, les bières de chez Lancelot, les cidres de Nicol et Lizio. Et quand c'est possible, ils préfèrent piocher dans la filière Bio !

Mais désormais, une petite question me taraude : quand reviendrons-nous en Bretagne et repasserons-nous à Vannes ?

Crêperie Dan Ewen

Françoise DANET

3 place du Général De Gaulle

56000 VANNES

Tél. : 02 97 42 44 34

Site web : http://danewen.fr


Marché couvert de Talensac, plus de 200 commerçants vous attendent !

Le marché de Talensac se situe au nord du centre-ville. Son accès en voiture n'est pas évident et il vaut mieux choisir l'option du parking souterrain tout proche plutôt que d'essayer de tourner autour en attendant qu'une place se libère. Installé dans une halle longitudinale sur 3 niveaux, c'est le plus important marché de l'agglomération nantaise.

Ce dimanche matin 12 février 2012 vers 11 heures 30, ça grouillait de monde, ambiance familiale garantie. Parmi les 200 professionnels qui exposent leur marchandise, principalement alimentaire, j'avais fait le pré-choix de quelques emplettes auprès de 4 commerçants.

Première pause gourmande chez Henny, une petite boutique située dans la travée centrale, au pied du 2ème niveau. On y trouve des "canelés" (même orthographe que celle utilisée par Baillardran). Ils sont bons (j'en prendrais 10), avec du moelleux et un bon goût de vanille, mais ils manquent de croustillant et n'atteignent pas le niveau de ceux proposés à la Galerie des Grands Hommes de la maison bordelaise sus nommée. Mais c'est vrai que dans cette boutique emblématique du "canelé", ils sortent du four. Henny présente aussi 40 versions salées pour l'apéritif (foie gras, pommes boudin, petits légumes, saumon, espagnols, anchois, crevettes-ananas ...) pour lesquelles je suis plus réservé pour cette déclinaison ... bien que ne les ayant pas goûtés.

Deuxième halte à "La petite boulangerie ®" du MOF 94 Franck Déperiers. Il y a beaucoup de monde qui patiente sur 2 rangs devant les vitrines. Nous avons fait le choix d'une "Boule bio" et d'un pain aux 2 céréales. Leurs croûtes étaient dorées, d'apparence croustillante et leurs mies bien aérées et souples. Leur dégustation nous a procuré beaucoup de plaisirs qui s'est prolongée les jours suivants. Les viennoiseries avaient l'air sympathiques et bien faites. Mais faute de temps et d'une petite place digestive, je ne les ai pas testées, bien que la brioche suisse m'attirait beaucoup.

Pour nos deux dernières escales, pas de problème, elles étaient l'une en face l'autre. Là aussi, des deux côtés, il y a beaucoup de clients qui attendent sagement leur tour. J'ai commencé par la fromagerie de Pascal Beillevaire dont les excellents beurres attirent tout de suite l’œil du gourmand, surtout quand on s'installe dans la file d'attente et qu'on n'a rien d'autre à faire que de regarder. Mon épouse fera provision de ceux aux algues, salé et nature. Naturellement les fromages sont l'autre point fort de cette boutique justement réputée. En majorité au lait cru, nous avons naturellement fixé notre choix dans cette gamme : un Curé nantais affiné au Muscadet, un Anneau de Vic-Bilh, un Munster et un Machecoulais finiront dans notre panier. Le personnel est des plus aimables et se laisse aller à plaisanter avec le client, surtout quand celui-ci a quelques difficultés à le comprendre !

Après les fromages, rien de plus naturel que de passer au dessert. Direction donc la boutique d'en face, celle de Vincent Guerlais, "agitateur de papilles ®". Les vitrines regorgent de pâtisseries toutes aussi plus affriolantes les unes que les autres. Elles sont sophistiquées et présentées avec grand soin. Si je n'avais pas eu une petite idée derrière la tête, j'aurais longuement hésité entre toutes ces merveilles exposées. Car que ce soit le Gaïa (Pain de Gêne, caramel tendre, mousse vanille bourbon et croustillant noix de pécan), le Crème d'ange (étrange entremet présenté dans un boîtage type "Mont d'Or" renfermant dans une délicate mousseline, une crème légère et une compotée de mangues fraîches), l'Exqui-mô (Crème vanille, gelée d'agrumes et crémeux agrumes présentés sous forme ... d'esquimau), l'Absolu (Chocolat noir, cœur de ganache, chocolat et caramel au beurre salé), on avait envie de tout acheté. Hélas, j'ai préféré, en vue de la Saint-Valentin, prendre un gâteau idoine baptisé "Secret Gourmand". Il se présentait comme une sorte de mini coffre-fort rouge associant une mousse de fraises des bois et rhubarbe à une crème fondante au chocolat au lait. Le tout était soutenu par une base de croquant au guanduja. Si ce dessert était incontestablement bon, son poids de plus de 360 g pour 2 lui attribuait un lourd handicap gustatif à surmonter. Mais c'est surtout sa préparation trop "mousse", un peu écœurante, qui aurait mérité l'apport d'un croustillant intermédiaire au milieu de sa structure. Mais ce n'est que partie remise, et contrairement par exemple à la maison rennaise d'un MOF où je ne remettrais jamais mes papilles, c'est sûr qu'à notre prochain passage, on reviendra ici et on s'en tiendra aux préparations classiques, très certainement avec notre couple d'amis gourmands d'Achères ...

HENNY Henni-Chebra - Tél. : 02 40 76 47 70

Ouvert tous les jours sauf le lundi

 

Fromagerie Pascal BEILLEVAIRE

Tél. : 02 40 20 43 51

Ouvert du mardi au dimanche

Site web : www.fromagerie-beillevaire.com

La petite boulangerie ® - Tél. : 02 40 74 36 38

Ouvert du mercredi au dimanche

Site web : www.lapetiteboulangerie.fr

Vincent GUERLAIS

Tél. : 02 40 35 49 02

+ trois autres points de vente à découvrir sur www.vincentguerlais.com



"L'U-Ni de Nantes", le nouvel univers gourmand de Nicolas Guiet

C'est le 11 novembre 2010, à l'issue d'un mémorable déjeuner à la MAO d'Eric Guérin (absent ce jour-là), que j'avais eu le plaisir de rencontrer Nicolas Guiet et de le féliciter de sa prestation. Je ne me doutais pas que quelques mois plus tard, ce jeune chef prendrait la décision de voler de ses propres ailes, avec, ce n'est pas banal, la totale bénédiction d'Eric Guérin.

Après une petite pause bien méritée début 2011 au Vietnam, il a cherché et trouvé dans le cœur du quartier Madeleine-Champ de Mars à Nantes son univers gourmand, baptisé l'U-Ni. Les lieux n'étant pas aptes au concept imaginé par Nicolas, il a fallu plusieurs mois de travaux, pour finaliser un décor moderne et chaleureux des plus agréable où le bois domine.

En ce dimanche 12 février 2012, après un détour par le marché de Talensac, j'ai enfin découvert cet écrin gourmand. Accueil sympathique et engageant de Guillaume, le responsable de la salle, lui aussi un ancien de la MAO, et de Nicolas. Très vite ce dernier rejoindra son piano, m'autorisant à faire quelques incursions filmées de son talent créatif.

Après une coupe de Champagne Joseph Perrier, généreusement servie, accompagnée de chips de sarrasin et d'une crème de chorizo, nous avons le plaisir de commencer notre menu Carpe Diem en 5 temps par un Bouillon de légumes oubliés (panais et céleri boule). Cette mise en bouche était très goûteuse et nous a bien ouvert l’appétit. Pour suivre, ce sera une Raviole d'émietté de blanquette de veau à l'encre de seiche, risotto, coques et couteaux poêlés, carpaccio de veau à l'huile d'olive, betterave ronde de Chioggia (ville italienne) et vinaigrette de seiche. Je dois avouer qu'après un tel énoncé, je suis resté un peu sonné par l'afflux d'informations, essayant de bien restituer tous les ingrédients présents dans mon assiette. Mais côté dégustation, cette entrée était un régal, un délice, mêlant habilement et harmonieusement tous ses composants terre et mer.

Deuxième service avec un Foie gras de canard poêlé, sablé au sésame noir, compotée d'oignons confits, grué de cacao gomasio, brunoise de céleri et salade de mâche au vinaigre balsamique. Le foie est de toute première qualité, la cuisson parfaite et l'accompagnement top ! On attend fébrilement la suite.

Ce sera une Joue de lotte braisée, jus au lard, salade tiède de chou violet au verjus. Qu'ajouter de plus, sinon quelques lignes à mon panégyrique.

Habitué des poulardes de Paul Renault, le Suprême de volaille fermière cuit à basse température, noodles au blé noir, poêlée de patates douces et de carottes (pourpres et jaunes), champignons évingi, pousses de moutarde rouge et bouillon de shitaké qui a pris la succession m'a sidéré. J'étais persuadé de déguster en effet une volaille de l'éleveur de Louvigné-le-Bais ! Et bien non, elle venait d'ailleurs, mais son mode de cuisson a fait le reste. Et en plus, le plat est super copieux !

Pour le final, place au dessert. C'est une Ganache au chocolat surmontée d'une mousse de noix de coco et citron vert, agrémentée par une subtile sauce piña colada et un bon sorbet verveine. C'est léger, bien maîtrisé au niveau de l'équilibre des saveurs et des arômes. A peine le temps de le décrire que je n'ai déjà plus rien dans l'assiette ... et que si une nouvelle part était venue se blottir dans mon assiette je l'aurais accueillie tendrement !

Les vins sont le domaine de Guillaume. Il puise ses accords dans une carte conçue en étroite collaboration avec Cyril Carré, le sommelier de la MAO. Cette carte fait une grande place aux vins issus de l'agriculture biologique, un peu trop peut-être. Mais en ce moment, c'est très tendance et très porteur, alors comment jeter la pierre à Nicolas ... Côté tarifs, j'ai regretté que les vins à moins de 20 € 00 ne soient pas plus nombreux. Un exemple à suivre, le Vieux-Pont à Belcastel, 1 étoile Michelin; et avec ces modestes tarifs pratiqués, Gilles Héliez en dépote. Car n'oubliez pas que 3 verres absorbés au cours d'un repas d'une heure ne font jamais atteindre, voir même dépasser, le fameux seuil des 0,50 g, fenêtre des résultats de mon Dräger à l'appui ...

Sur la Raviole, nous avons été agréablement surpris par un Bergerac AOC 2010 du Domaine des Terrasses. C'est un vin doté d'une belle fraîcheur et très aromatique dû certainement à sa dominante de Sémillon complété de 30 % de sauvignon, le tout apportant un fruité des plus engageant.

Pour le Foie gras, c'est un VDP d'Oc 2010. Ce vin d'un négociant héraultais est issu d'un surprenant assemblage chardonnay/viognier. Il est plaisant et escorte bien le plat. Toutefois sa dégustation me confirme une fois plus que le cépage viognier trouve sa plénitude aromatique dans son terroir de prédilection, c'est à dire à Condrieu.

La préparation des Joues de lotte appelait un vin avec une bonne charpente. L'habitude conduit souvent à proposer le poisson avec un vin blanc. A l'U-Ni, ce sera un Côtes du Rhône 2007 rouge "Haut-Musiel". Composé de grenache, syrah et carignan, il fera un contrepoint idéal au jus au lard et au verjus. J'attendais de voir quel vin Guillaume allait nous sortir sur la Poularde. Cap sur le Languedoc, avec un Minervois AOC 2010, bien fruité, associant 50% de Grenache, 25% de Cinsault & 25% de Mourvèdre.  Malgré son jeune âge, les tanins étaient fondus et le vin était malgré tout suffisamment charpenté pour dominer sa complexe escorte d'accompagnements. Ah, j'allais oublier de citer sa dénomination : "Mais où est donc ornicar". Ça aussi, c'est devenu très tendance actuelle des jeunes vignerons de l'hexagone. Peut-être trouvent-ils dans cet exercice de style un moyen de se prendre pour des prétendants au prix Goncourt de la meilleure appellation ? Personnellement, ça commence à m'irriter et ça me rappelle la pratique (toujours utilisée) de certains cuisiniers qui illustrent les plats de leur carte à grands coups de superlatifs comme "virtuel", "cubisme", "dynamite", "déstructuré" ou autres patronymes de ce genre.

Cet U-Ni a été une excellente découverte et va devenir la "petite" table nantaise qui monte, celle qu'il sera impératif de fréquenter ... si on est un vrai gourmet naturellement. Nicolas et toute l'équipe, à bientôt.

 

Le nouveau site du Guide Michelin consacre un joli reportage à Nicolas Guiet. A voir impérativement.

L'U.Ni

Nicolas GUIET

36 rue Fouré

44000 Nantes

Tél. : 02 40 75 53 05

Fermé lundi soir et mardi


Adieu Gilbert ...

En mai 2011, je débutais mes rubriques culinaires et j'avais consacré à Gilbert Calhac quelques lignes dans l'une d'entre elles.

Gilbert, ce dimanche après-midi 19 février 2012 tu t'es arrêté brusquement de gravir l'échelle de la vie en chutant accidentellement d'une autre, moins virtuelle celle-là, hélas. Tu étais devenu depuis un jour de septembre 2001 "ma" référence en matière d'exemple de vie et de joie de vivre quand je m'étais rendu compte des difficultés inhérentes à ton dur métier d'éleveur/agriculteur. Toi, tu n'avais pas besoin d'un slogan éculé pour travailler plus. Car ce n'était pas forcément pour gagner plus que tu travaillais mais c'était tout simplement vital, juste pour vivre décemment. L'élevage des veaux de lait, au stade artisanal auquel tu le pratiquais, n'était pas des plus rentables, notamment quand tu faisais à la fin de ta journée, le compte de tes heures travaillées. En effet, contrairement à la paperasse administrative à laquelle, moi "petit fonctionnaire" j'étais confronté journellement (et qu'on peut remettre au lendemain, voir plus !), les bêtes, elles, n'attendent jamais. La tétée du matin de 6 heures/6 heures 30, impossible de la remettre à plus tard, de même que celle du soir de 18 heures/18 heures 30. Et ce n'était pas hélas ta seule activité. A 8 heures, il fallait aussi te préparer à assurer le transport scolaire des élèves du canton, des élèves qui, comme tous les gens d'ici, t'aimaient beaucoup. Rebelote en fin d'après-midi pour les ramener chez eux. Entre-temps, tu assurais le travail des champs et une foultitude de petites activités qui étaient ton quotidien, oui je dis bien ton quotidien, car les animaux n'ont pas de samedis et de dimanches, encore moins de congés annuels ou d'ARTT, sans oublier les jours fériés ! A cela, venaient se greffer les petits bobos inhérents au côtoiement des bêtes. Elles font parfois des écarts et ça donne par exemple trois côtes cassées. Gilbert, tu me demanderas ce jour-là de ne pas te faire rire comme j'en avais pris l'habitude à chacune de mes visites au Colombier. Mais on ne remise pas facilement ses bonnes habitudes au vestiaire et si mes plaisanteries t'ont un peu secoué ce jour-là le sternum, tu m'as tout de suite pardonné mon excès de bonne humeur ...

Gilbert, cet après-midi du mercredi 22 février 2012, ils étaient nombreux, très nombreux, les copains et amis qui te pleuraient, entre 500 et 600 qui sont venus spontanément te témoigner leur affection. Ils n'avaient pas tous d'ailleurs réussi à trouver une place à l'intérieur de cette église Saint-Médard de Mourjou, devenue subitement trop petite pour nous accueillir et nous recueillir. C'est pourquoi ils étaient aussi nombreux sur son parvis. Après la traditionnelle messe, tous sont passés devant ton cercueil pour te rendre un dernier hommage, te tirer une dernière révérence. Cela a duré plus de 40 minutes ...

La Châtaigneraie, ta Châtaigneraie, est aujourd'hui orpheline. Elle n'entendra plus jamais le son de ta voix avec cet accent particulier qui me réjouissait dès que je l'entendais, une voix toujours joyeuse. Nous qui restons aujourd'hui, nous avons perdu beaucoup plus qu'un ami. Je pense beaucoup aujourd'hui à Odette & à Rémy, à Didier ton frère, à toute ta famille, tous cruellement frappés par cette injustice. Mais soit assuré que je continuerais à adresser au Colombier ces petites cartes postales qui te faisaient voyager et dont à chaque réception, tu t'empressais d'en faire part à Louis-Bernard.

Adieu mon Gilbert et repose en paix ... et que la vidéo qui suit permette à celles et ceux qui t'aimaient de te revoir et te retrouver de temps à autre, histoire de laisser ouvertes quelques pages du grand livre de l'oubli.

Le 10 mai 2019, Rémy, son père, nous a quitté à 85 ans.


Chicken's house
Maison Poulet

Cette photo rend hommage à mes parents et grands-parents, dont la triple activité commerciale de

"coiffeur-bar-restaurant" constituait, à l'époque, un univers de convivialité inégalable et jamais égalé !

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